Résumés

 !! Vient de paraître !!

 L’Épistémologie du dedans. Mélanges en l’honneur de Hourya Benis-Sinaceur

Classiques Garnier, collection Rencontres, n° 479, série Études de philosophie, n° 13, 597p., 2021, E. Haffner, D. Rabouin, (Dir.)

Actes-colloque_eh_dr_2021 [Télécharger le livret]

Par ordre de passage, vers les résumés de :

       |  J.-M. Salanskis   | M.-F. Roy | R. Rashed  | M.-J. Durand-Richard |  M. F. de Castro  

       |  P. Cortois   | E. Grosholz | E. Scholz  | E. Haffner |  I. Smadja |  J.-P. Marquis

 


 

Jean-Michel SALANSKIS   | Université Paris Ouest Nanterre, IRePh

 "Histoire, mathématique, philosophie"

Le travail d’Hourya Sinaceur témoigne de part en part d’une triple allégeance: 1) à la mathématique dont elle admire les constructions, les déductions et le traitement des problèmes; 2) à la philosophie et à la méthode de la discussion fine des distinctions conceptuelles; 3) à l’histoire comme document et laboratoire dont nous avons besoin pour ne pas parler de nos sujets de manière vaine.Je voudrais montrer, sur plusieurs exemples, comment elle a conjugué ces trois fidélités dans ses différents livres et articles.


Marie-Françoise ROY  | Professeure émérite, Rennes 1

"Elimination des quantificateurs versus 17e problème de Hilbert"

Transparents de l'exposé de Marie-Françoise Roy

Artin donne une réponse positive au 17e problème de Hilbert: tout polynôme ne prenant que des valeurs positives ou nulles est somme de carrés de fractions rationnelles. Sa preuve met en évidence la puissance de l'algèbre moderne, et n'est pas constructive. Une de ses étapes essentielles est la première apparition du principe de transfert en géométrie algébrique réelle, montré en toute généralité par Tarski grâce à l'élimination des quantificateurs. Alors que l'élimination des quantificateurs est dès son origine clairement donnée par un algorithme, une preuve du 17e problème de Hilbert construisant effectivement la somme de carrés est beaucoup plus difficile. Du point de vue de la complexité, on dispose depuis plusieurs décennies d'algorithmes élémentairement récursifs pour l'élimination des quantificateurs, mais la construction de la somme de carrés pour le 17ème problème de Hilbert avec une méthode élémentairement récursive est très récente (travail en collaboration avec H. Lombardi et D. Perrucci).


Roshdi RASHED   | CNRS, SPHERE

"Fermat critique de la Géométrie de Descartes."

Fermat critique de la Géométrie de Descartes.


Marie-José DURAND-RICHARD  | SPHERE

"L’algèbre Symbolique comme fondement des pratiques algorithmiques à Cambridge (1801-1839)"

Le réseau des algébristes anglais est traditionnellement considéré comme l'un des points d'ancrage qui, dans la première moitié du XIXe  siècle, marquent la lente mutation de l'algèbre vers l'étude des structures abstraites. Leur démarche se nourrit d’une volonté réformatrice et fondationnelle dont les sources continentales et les ressorts institutionnels ont déjà été abondamment étudiés. Dans cette perspective, elle est envisagée comme une rupture radicale face à la double fidélité de l'enseignement des mathématiques à Cambridge envers la géométrie euclidienne et les Principes Mathématiques de la Philosophie Naturelle  d'Isaac Newton (1642-1727).  De fait, dans cette tentative d'algébrisation des méthodes analytiques en mathématiques, les éléments de rupture le disputent à des éléments de continuité. La Mécanique Céleste de Laplace vient alors de réconcilier les positions de Newton et de Leibniz sur le système du monde. Et les algébristes anglais, de Robert Woodhouse (1773-1827) à George Peacock (1791-1858) et Augustus de Morgan (1806-71), peuvent désormais considérer l’analyse algébrique comme l’outil adéquat pour en exprimer les lois. Leur souci majeur est alors d’intégrer dans un édifice démonstratif les acquis des démarches heuristiques – analogie, induction, généralisation –  qui ont accompagné l’algébrisation du calcul infinitésimal, notamment dans les développements en série, tant en Grande-Bretagne que sur le Continent. Leur traitement symbolique des procédures algorithmiques, de nature essentiellement philosophique, s’appuie sur une conception de l’algèbre comme langage universel des opérations de l’esprit, étayée par la notion d’arbitraire du signe chère à John Locke (1632{1704) dans son Essay on Human Understanding. La diversification des structures abstraites, et leur installation au cœur de l’algèbre, passera par l’abandon de la hiérarchie ainsi supposée entre nécessaire et contingent. Ce processus sera lent. Il a requis la prise en compte des relations réciproques entre syntaxe et sémantique, dont j’ai pu appréhender l’importance grâce à l’ouvrage de Hourya Benis-Sinaceur, Corps et Modèles, qui en retrace à la fois la mise en œuvre et l’explicitation jusqu’à la théorie des modèles.


Max Fernández DE CASTRO  | UAM

"The Controversy between Frege and Hilbert"

Throughout this text, I will focus my attention in two subjects of the debate Frege-Hilbert: a) the difference between axioms and definitions, b) the proofs of independence of axioms. Regarding the first topic, I will uphold the view that Hilbert and Frege had different notions of what ‘concept’ meant. I will also show that Frege's formal definitions are not only abbreviations and that Hilbert’s position is problematic. Later on, I shall explore some interpretations of Frege’s objections to Hilbert’s proofs of consistency and independence. I believe that Blanchette’s interpretation, that gives a special role to the conceptual analysis in the search for logical relations, is the most appropriate, since it fits better with most of the textual evidence. Nonetheless, it also creates certain puzzling consequences. Therefore, I recommend extending this interpretation so as to adjust it to the textual evidence.


Paul CORTOIS  | KU Leuven

"Vers une interprétation moins tronquée de l'œuvre tronquée de Cavaillès"

Le livre intitulé simplement Cavaillès, publié aux Belles Lettres (2013), constituait un événement intellectuel de premier ordre dans le monde philosophique en France et même au-delà. On peut dire en effet sans beaucoup d'exagération que cet ouvrage a bel et bien jeté de nouvelles bases pour la réception de la philosophie de Cavaillès. Hourya Benis Sinaceur avait déjà donné plusieurs études sur ce philosophe avec lequel elle a une affinité élective : plusieurs articles mettant en évidence la proximité de Cavaillès avec les mathématiques effectivement faites en ses jours (comme les écoles allemandes d'algèbre moderne en particulier et Bourbaki) et la monographie de 1994 Jean Cavaillès - Philosophie mathématique présentant une synthèse de cette pensée considérée comme épistémologie mathématique. Néanmoins le livre récent élargit et approfondit considérablement l'interprétation philosophique de l'œuvre – aussi l’œuvre posthume – de Cavaillès. Le trait le plus remarquable et novateur de cette étude est selon moi la reconnaissance ouverte – à côté du "spinozisme" déjà maintes fois reconnu – d'une certaine tendance hégelienne dans l’œuvre posthume. Certes, une telle tonalité avait été relevée par plusieurs commentateurs, mais c'est la première fois que cette lecture est arguée de façon aussi pertinente, documentée et disons-le, indéniable. L'influence de Cavaillès dans la philosophie d'après-guerre a été réelle mais est restée plus ou moins souterraine jusqu'à présent. L'ouvrage d'Hourya Benis Sinaceur aidera sans doute aussi à changer en quelque mesure cet état de choses.


Emily GROSHOLZ  | Pennsylvania State University

"Reflections on Cantor’s and Dedekind’s Theory of Numbers"

The very abstraction of set theory puts important limitations on its use in mathematics, limitations that philosophers have been content to ignore, perhaps because of set theory's obvious successes. One way to broach this topic is to remind ourselves that canonical sets, the sets preferred by set theorists because they are most "purely" sets, are constructed out of elements with no intrinsic structure: sets designed for arithmetical uses are built up from the empty set, and sets designed for geometrical uses are built up from points. Both the empty set and the point have no internal structure, and therefore no intrinsic relation to anything else. Set theorists also tend to suppose that when sets have ordered elements, that ordering can be stripped away completely and then, if necessary, added back on. In the case of finite sets, this assumption seems trivial: we simply mix up the elements, and discover that the set is still the same set: (a,b,c) is the same set as (b,c,a). One aspect of Cantor's genius was his ability to see the mathematical fertility of mixing up the elements of infinite sets in such a way that the "natural" or intrinsic order of the elements is abstracted from. Thus, by indexing the rational numbers (or the algebraic numbers) in a certain order distinct from their "natural" order, he showed that the cardinality of those sets of numbers is just the same as the cardinality of the natural numbers. But no matter how we order their elements, the set of rational numbers (or algebraic numbers, or for that matter natural numbers) remains the same set. Given these conventions about the formation of sets, I want to point out some problems or peculiar features of the formation of certain sets. In fact, I want to contest the claim that sets can be formed from the empty set, or from points alone; and that the ordering of certain sets can simply be stripped from them. I do this by arguing that the sets allegedly built up from the empty set are really built up from iterations of the operation and meta-object ( ) and presuppose the availability of the natural numbers; and that sets allegedly built up from points are really built up from point-numbers (hybrids) and presuppose the availability of the line or continuum. Moreover, I argue that in a precise sense the ordering of the natural numbers cannot be stripped from them, and that this also holds for the number-line, the reals. In these arguments, my Leibnizian notion of the "conditions of intelligibility" will be central. As mathematical analysis searches for the conditions of the solubility of problems, so philosophical analysis searches for the conditions of intelligibity of problematic things, what makes them possible for thought. Things require explanation; they don’t wear their conditions of intelligibility on their faces. Analysis is the search for the requisites that make something what it is; it distinguishes or develops the content included in a thing. Throughout my essay, I will make use of Hourya Sinaceur’s writings on Dedekind (and Cantor) and Cavaillès.


Erhard SCHOLZ  | Bergische Universität Wuppertal

"E. Cartan's inventive bridge between Einstein and the Cosserats: Why translational curvature became to be known as torsion"

Elie Cartan's "généralisation de la notion de courbure" (1922) arose from a creative evaluation of the geometrical structures underlying both, Einstein's theory of gravity and the Cosserat brothers generalized theory of  elasticity. In both theories "localized'' symmetries played a crucial role.  To judge from his publications in 1922-24, Cartan developed his concept of generalized spaces  with the  dual context of general relativity and non-standard elasticity in mind. In this context it seemed natural to express the translational curvature of his new spaces by a rotational quantity (via a kind of Grassmann-Hodge dualization). So Cartan  called his translational curvature "torsion" and  coupled it dynamically to a hypothetical rotational momentum of matter before spin was encountered in quantum mechanics.


Emmylou HAFFNER  | Bergische Universität Wuppertal & SPHERE

"Arithmétique, logique et généralité chez Richard Dedekind"

En 1888, Dedekind ouvre Que sont les nombres et à quoi servent-ils ? par l’affirmation – désormais bien connue – que « l’Arithmétique (l’Algèbre, l’Analyse) [sont] une simple partie de la logique ». Ceci, explique-t-il immédiatement, signifie que le « concept de nombre [est] totalement indépendant des représentations de l’espace et du temps » et doit être plutôt considéré comme une « émanation directe des pure lois de la pensée ». Largement et longuement commenté, ce passage a donné lieu à de nombreuses interprétations logicistes de la pensée de Dedekind. Hourya Benis Sinaceur, dans les notes introductives à ses traductions des écrits fondationnels de Dedekind (Vrin, 2008) et des articles récents, combat cette interprétation. Par une comparaison fine des conceptions de la logique de Dedekind et de Frege, elle montre que la logique, chez Dedekind, ne peut être compatible avec un logicisme au sens strict.
Dans cet exposé, je partirai des travaux de Sinaceur sur les liens entre arithmétique et logique pour, dans un premier temps, clarifier leurs liens avec les « pures lois de la pensée ». Cela me permettra d’approfondir l’idée, présente chez Sinaceur, que l’arithmétique est, pour Dedekind, constitutif de la pensée humaine. Enfin, en utilisant des exemples tirés des travaux mathématiques de Dedekind, j'indiquerai de quelle manière cette conception de l'arithmétique lui permet de développer des outils mathématiques (algébriques) extrêmement généraux et puissants, en se reposant seulement sur les « principes arithmétiques les plus simples ».


Ivahn SMADJA  | Université Paris Diderot, SPHERE

"Hermann Hankel et les Berlinois : sur deux conceptions des mathématiques et de leur histoire"

Hermann Hankel (1839-1873) est souvent présenté comme une figure de second plan ayant joué un rôle clé dans toute une série de configurations particulières de l’histoire des mathématiques allemandes du dernier tiers du XIXe siècle : la redécouverte de Bolzano que la gloire de Cauchy avait un temps éclipsé, l’essor de conceptions “formalistes” du nombre comme signe, la mise en circulation de certaines des idées de l’École algébrique anglaise, la réception de l’Ausdehnungslehre de Grassmann, l’introduction des quaternions en Allemagne, l’élaboration de la théorie des systèmes de nombres hypercomplexes, les premiers pas vers une théorie moderne de la mesure et de l’intégration, enfin l’émergence de l’histoire des mathématiques comme champ disciplinaire autonome et spécifique.
Ce portrait kaléidoscopique risque de masquer en partie la nature des relations qu’entretiennent chez lui une « image des mathématiques » originale et une pratique historiographique spécifique. Pour tenter de mieux cerner l’unité de sa réflexion, nous proposons quelques éléments de comparaison avec une autre conception des mathématiques et de leur histoire, celle de Jacobi, Kummer et Kronecker.


Jean-Pierre MARQUIS  | Université de Montréal

"Métamathématique et logique catégorique"

Ainsi qu’Hourya Sinaceur l’a si bien montré dans plusieurs de ses articles, la nature et les fonctions de la métamathématique ont grandement évolué au cours du XXe siècle. Dans cette conférence, je reprendrai certaines des analyses présentées par la Professeure Sinaceur et je tenterai de montrer comment la métamathématique s’articule dans le contexte de la logique catégorique.

 

 

 

 

 

e
Personnes connectées : 1